La mesure de réparation a plusieurs objectifs :
- Favoriser un processus de responsabilisation qui reconnaît le mineur comme sujet de droit répondant de ses actes.
- Aider le mineur à comprendre la portée de son acte et lui faire prendre conscience de l’existence d’une loi pénale, de son contenu et des conséquences de sa transgression pour lui-même, pour la victime et pour la société toute entière.
- Prendre en compte la victime.
- Donner au mineur l’occasion de se réinscrire positivement dans le corps social en mobilisant ses potentialités.
- Permettre au mineur de s’engager dans un processus de restauration de l’estime de soi.
Saisine et Déroulement de la mesure
Suite à un acte délictueux commis par un mineur, le Substitut du Parquet oriente le jeune vers :
- le Parquet où le Délégué du Procureur pourra prononcer un rappel à la loi et/ou une mesure de réparation pénale.
- Le Juge des enfants qui peut déterminer une mesure de réparation pénale au cours de l’instruction du dossier ou prononcer la mesure de réparation pénale comme jugement. Cette procédure a changé suite à la mise en œuvre du CJPM en fin d’année 2021. Désormais le module réparation intervient dans le cadre d’une MEJ.
Nous sommes alors saisis par ces deux instances par le biais d’une ordonnance.
Contenu de la mesure
1 – Premier entretien
Ce premier entretien se déroule en présence des parents ou des civilement responsables, du mineur et de l’éducateur référent de la mesure. Il est essentiel dans la construction du lien entre le mineur et l’éducateur en charge du travail éducatif nécessaire à l’exercice de cette mesure. Ce temps est également un moment pour la famille d’expression de son incompréhension, sa colère, sa détresse… que ce soit à l’égard de l’institution judiciaire ou des conséquences de l’acte posé par leur enfant…avant d’aboutir à un apaisement permettant la réflexion autour du projet de la mesure. Il s’agit de replacer les parents devant leur responsabilité, mais également de leur [re]-donner une place souvent un peu perdue ou diluée dans les difficultés d’un quotidien ou celles liées à l’éducation d’un adolescent dont ils ne comprennent pas les agissements. Le sens même de leur autorité leur échappe. L’éducateur revêt souvent un rôle de médiateur facilitant ainsi la communication entre le mineur et ses parents, afin de dépasser les tensions, incompréhensions et conséquences de ce passage à l’acte.
L’éducateur recueille également des éléments de contexte de vie du mineur, ainsi que la narration des faits. Chacun a l’occasion d’exprimer son ressenti et ses attentes. Il s’agira également de relever le contexte du passage à l’acte, ainsi que les facteurs ayant conduits ce dernier, afin de les mettre au travail avec le mineur pour éviter la réitération.
La présentation des outils à activer sera suivie d’un temps d’échanges afin de définir ensemble le projet de la mesure. Il sera laissé un délai de réflexion, au besoin, pour affiner le contenu (notamment réflexion sur la journée de réparation indirecte). S’ensuit la rédaction et la signature du D.I.P.C.
2 – Les entretiens individuels
Chaque mineur sera accompagné dans sa singularité. Chaque mesure sera individualisée et personnalisée pour répondre de manière efficiente aux objectifs. L’éducateur devra ainsi s’adapter à chaque mineur en fonction de ses capacités et de son discernement.
Lors des temps de travail avec le mineur l’objectif est de l’amener à une prise de conscience de la gravité des faits et des conséquences en s’appuyant sur un travail de recherche autour des notions afférentes.
Ce travail d’« élaboration » et de conscientisation qui vise à amener l’auteur à pouvoir reconnaître du sens à son acte est un enjeu essentiel.
La mesure vise également une amélioration nette en termes de compréhension du sens de la loi, de prise en compte d’autrui voire de capacité d’autocontrôle.
Les thématiques abordées :
- La responsabilité
- Le respect des autres
- Le respect du bien d’autrui
- Dénonciation calomnieuse
- L’insécurité routière en France
- Réflexion sur la sexualité
- Violence (Violence en général, sur éducateur, sur agent de police, sur professeur)
- Le port d’arme
- Le droit à l’image
- L’utilisation des réseaux sociaux
- Les dangers du feu
- Les conduites addictives (stupéfiants/alcool…)
Cette liste n’est pas exhaustive. En fonction du délit et de la personnalité du mineur, l’éducateur individualisera les outils et adaptera sa prise en charge. Ces questionnaires sont des outils permettant de faire un état des lieux des connaissances et du positionnement du mineur. L’essentiel se situera dans les échanges avec l’éducateur, échanges qui doivent permettre une évolution chez le mineur.
3 -La lettre d’excuses
Il s’agit de confronter le mineur à la question des conséquences de son acte pour l’autre qu’il a atteint, cette autre personne qui est ici devenue victime. La rendre présente ne passe pas seulement par la présence matérielle concrète de la victime. C’est aussi dans le discours de l’éducateur, dans sa capacité à nommer, que se joue cette présence rétablie. L’éducateur accompagnera le mineur pour mettre en mots ses ressentis, ses regrets, ses excuses, en valorisant l’authenticité et la sincérité des propos. Actuellement cette lettre d’excuses est adressée au magistrat. Nous n’avons pas de contacts directs avec la victime.
4 – Les audiences correctionnelles
Les audiences correctionnelles sont proposées principalement pour les mineurs de plus de 16 ans. Il s’agit de confronter le mineur, à l’aube de sa majorité, à la Justice des majeurs. L’éducateur accompagne un petit groupe de jeunes lors de temps dédiés. Il s’agira de les confronter au système judiciaire et à la loi. A la suite, un temps d’échanges est organisé où chacun peut expliquer ce qu’il a pu décrypter de ce fonctionnement, les rôles de chacun, les peines…
5 – Journée d’activité (Réparation directe ou indirecte)
Dans le cadre de la mesure de réparation il est proposé au jeune de s’engager dans une démarche restaurative en réalisant une activité ou une action au bénéfice de la victime (la réparation directe) ou dans l’intérêt de la collectivité (la réparation indirecte).
Une convention est signée entre l’APREMIS et la structure afin de formaliser cette activité. Un bilan nous est renvoyé par l’encadrant de la journée dans lequel nous retrouvons une évaluation du comportement et des échanges avec le mineur.
L’activité oblige le jeune à nouer des liens avec d’autres, dans un contexte décalé de son contexte de vie habituel, auprès de personnes qu’il a peu ou pas l’occasion de côtoyer dans des relations non-conflictuelles, et de collaboration. Cette activité permet la rencontre d’autres personnes, porteuses d’autres schémas, d’autres valeurs, d’autres goûts et intérêts. Il y a là un travail possible des valeurs, qui s’appuie sur l’objet des associations ou collectivités qui accueillent.
En se mobilisant activement dans la réponse sociale à la déviance des mineurs, ce réseau permet au jeune d’éprouver ce que le maillage du social peut lui apporter en termes de soutien et d’aide, mais aussi d’exigences structurantes.
Simultanément, c’est l’image altérée du mineur délinquant qui est rectifiée, simplement par le fait du caractère souvent très ordinaire de ce jeune déviant. Par ce biais, le mineur peut quitter le terrain des sentiments de honte et de la culpabilité, plus ou moins exprimés, parfois totalement refoulés (et c’est là le risque d’une « réitération » possible). La restauration de soi d’une certaine manière boucle ce processus de l’utilité. Elle renvoie le sujet à lui-même, au sentiment de sa propre valeur, et donc à sa place dans le regard des autres. L’auteur peut se réenvisager en tant que « personne », et quitter le terrain de la qualification stigmatisante qui a pesé sur lui du fait de son acte déviant.
Liste des partenaires : Banque Alimentaire, Resto du Cœur, Secours Populaire, Maison pour
Tous, Croix Rouge, ADAVEM 80, Mairie de Longueau, Centres sociaux-culturels, Aprémis Abbeville (avec l’agent d’entretien), Mémorial de Thiépval….Cette liste n’est pas exhaustive, nous travaillons avec chaque partenaire utile pour la mesure du mineur. Le lieu de la réparation doit avoir un sens pour le mineur.
6 – Synthèse et bilan de la mesure
Un entretien éducatif, nous permet d’échanger avec le jeune, ses représentants légaux et/ou un professionnel intervenant auprès de la famille. Cette rencontre permet de faire le point sur le comportement du jeune et la répercussion de la mesure au quotidien.
L’éducateur référent explique à la famille les points positifs et / ou négatifs, ses questionnements qu’il inclura dans le rapport transmis au magistrat. La famille a la possibilité de prendre connaissance des travaux réalisés.
A l’issue de l’entretien, un bilan est rédigé par l’éducateur à destination des magistrats. Il décrit le déroulement de la mesure, les activités réalisées dans ce cadre et l’implication du mineur. Ces éléments permettent d’évaluer l’évolution du jeune, sa prise en considération de la victime et l’impact de la mesure de réparation pénale à son égard.
Le bilan est lu et co-signé par la Directrice adjointe. Le rapport de fin de mesure, ainsi que tous les écrits produits par le mineur sont adressés aux magistrats.